Jean a 35 ans, et 11 ans de Mc Do. «Je suis rentré comme équipier pour financer mes études d’économie. Aîné de ma famille, j’ai du travailler rapidement suite au divorce de mes parents. J’ai évolué rapidement, d’équipier, je suis monté «swing», puis je suis devenu manager».
Fort de son ancienneté, c’est lui qui a vu défiler les costumes : "des chemises blanches, des bleues, des bleues avec des pois, des cravates unies, des rayées, avec ou sans logo... Tous les matins, je pars habillé en Mc Do. Ce que nous portons, nous les managers, c’est discret. C’est presque comme un costume de ville. Pourtant, dans mon quartier presque tout le monde sait que je travaille chez Mc Do. Parfois quand je fais mes courses, on me dit «bonjour monsieur Mc Do...»
Maryline, 18 ans partage sa chambre avec son petit frère (les affiches de foot, c’est à lui), son domaine à elle, c’est sous la mezzanine. Equipière depuis 3 mois chez Mc Donald, ses 20 heures de travail hebdomadaire répartis après ses cours et les week-end lui assurent une indépendance financière.
"Aller au cinéma, pouvoir acheter ce qui me fait plaisir sans y regarder à deux fois… décharger ma mère de certaines dépenses. Le costume, ça ne me dérange pas. On arrive, on se change, ça aide à passer dans un autre univers, et après le travail, c’est pareil." Après son bac, Maryline projette de passer un an en Grande-Bretagne pour apprendre l’anglais, puis de s’inscrire en BTS Action Commerciale." Pour moi, Mc Do, c’est un passage… "
Ali a 25 ans, manager depuis 7 ans chez Domino’s Pizza. Il vit toujours chez ses parents, "question de confort". Il a aussi un studio juste à côté du magasin, "question de pratique".
"Le costume ? c’est l’amour du maillot ! T’es fier de le porter, ca veut dire que tu vas te donner à fond pour ton travail; je suis rentré dans la boîte comme livreur, pour un an, à temps partiel, j’étais encore étudiant. J’ai fait un an de médecine, je voulais devenir kiné, j’ai raté le concours. Finalement j’ai suivi une formation d’assistant... et l’histoire d’amour a commencé… J’ai été assistant pendant 2 ans, et maintenant ça en fait 4 que je suis manager : tu gères le magasin de A à Z pour un franchisé : stock, êtres humains, chiffre d’affaire, clients. C’est un boulot dur, lourd de responsabilités, limite trop de responsabilités, mais c’est une bonne école pour l’avenir”. L’avenir ? “Un boulot dynamique, pas dans un grand groupe où je me perdrais dans la masse, un boulot avec des perspectives ".
Olivier, 24 ans, étudiant en maîtrise d’histoire à la Sorbonne. "Je suis livreur chez Domino’s depuis décembre. Avant ça, j’ai eu plein d’autres jobs : Carrefour, Mc Do (13 jours), Galeries Lafayette, j’ai vendu des chaussures boulevard St Michel, j’ai été serveur, commis, j’ai aussi travaillé à Londres…
Au début, c’était pour me payer des voyages. Maintenant, c’est plus une nécessité : financer mes études, contribuer au loyer avec mon frère… Le costume, c’est clair : les gens t’identifient livreur de pizzas. Dans la rue, souvent, j’entends : eh, t’as pas une pizza pour moi ? J’ai un contrat de 18 heures, on est payé au Smic, mais on se fait des pourboires. Dans le 16e, ceux qui donnent le moins, ce sont les nobles… les "de" quelque chose. Sinon, les américains, eux, ils donnent toujours. Parfois, il y a des gens qui abusent, un jour, un type m’a demandé de descendre ses poubelles…"L’avenir, après la fac, franchement je ne sais pas quoi faire, comment m’orienter… "
Mahmoud 37 ans est originaire de Syrie et partage un studio avec trois compatriotes. Ex-chauffeur de ministre dans son pays, ex-boulanger en Jordanie, il est aujourd’hui ouvrier du batiment six jours sur sept, et on peut le rencontrer les fins de semaine métro Charonnes, place d’Italie ou à Bastille.
Sans boutique ni pas de porte, dans son blouson, sous sa casquette frappés "Journal du Dimanche il vend à la criée : "Journal du dimanche, bonjour bonjour, bon appetit, bon courage… la semaine prochaine à République… "