>>> Ce qui me manque le plus dans cette histoire, c'est la possibilité de rencontrer des gens et de partager, donc un beau matin, j'ai fabriqué cette pancarte que j'accroche à ma fenêtre lorsque je travaille dans mon bureau (qui donne sur la rue), et j'attends... parfois des passants me hèlent... D'autre part je souffre d'un sérieux problème de concentration pour en finir avec des tâches administratives inintéressantes et contraignantes, je cherche donc un moyen de me ... confiner dans mon bureau. Attendre les passants pour les photographier est une excellente méthode, je pense.

>>> Le premier passant, coïncidence amusante, est un collègue mais que je ne connaissais pas auparavant. Il s'appelle Stéphane Durieu et m'a aussi proposé de réaliser mon portrait à ma fenêtre. Un bon exercice de champs / contre-champs, très didactique pour comprendre le "dispositif"

>>>13h44 / C'est Margot et Oliver, elle est franco-australienne et lui britannique. Ils viennent de Vincennes, marcher un peu ici, aux heures creuses de la journée. Vincennes c'est à quelques centaines de mètres d'ici.
>>>>15h29 / J'ai redescendu ma pancarte, ma voisine Monique, qui commence un peu à ressortir dans la rue me dit, "ma pauvre fille, tu as de drôles d'idées! C'est marrant, mais bon...". Monique reviendra plusieurs fois dans l'après-midi, finalement apparement conquise et amusée par le dispositif. Je lui disais en rigolant, Monique, tu veux faire mon assistante ? Du coup, elle n'hésite pas à héler les passants. Monique et son mari Michel, artisans à la retraite sont des personnalités du quartier, on les apprécie beaucoup. Michel a aussi beaucoup de talent lorsqu'il fabrique des lampes avec des objets de récupération, mais, homme modeste et discret, de cela il ne veut pas trop parler je crois...
>>>> 15h32 / Emma et Suzanne m'ont hélée : Sophie, tu nous prends en photo ?
A 16h30 j'ai aussi rencontré Anne, dont je découvre qu'elle est restauratrice de céramiques, deux rues plus bas
>>>> 17h02 : passe Véronique, qui me raconte qu'elle fait des bouquets entre autres pour ses voisines infirmières...
>>>> 17h22 passent Luca, Anais et Inès, très à l'aplomb de ma fenêtre car curieusement il y a un peu de circulation, pas question de se mettre au beau milieu de la rue (rapport au livreur fou en trottinette électrique de l'autre soir qui a percuté Paul de plein fouet)
>>>> 17h33 Didier et Etienne marchent dans la rue. Etienne, je le connais, c'est l'un de nos voisins "de derrière", il est prof d'éco dans un lycée parisien ; Didier est documentariste, il me dit avoir retenu mon nom suite au papier dans Le Monde sur le quartier, au tout début du confinement (décidément j'aime pas ce mot là)
>>>> 17h39 : Suzanne et Ewa, qui vivent un peu plus haut dans rue. Trop impatiente de rencontrer de nouvelles personnes, je suis scotchée à mon bureau et du coup, miracle, ma comptabilité avance. C'est magique
>>>> 17h59, Victoire sur son beau vélo avec qui je bavarde un peu plus longuement, très consciente que si on a une maison, un jardin, on n'a PAS le droit de se plaindre, on est bien d'accord.
18h22, suivent Suzanne et sa petite soeur Joséphine
>>>> 18h30 = Cecil, Billy et Anna, dont je fais la connaissance
>>>> 18h53 : Sophie, amie et voisine qui remonte des piles de draps pour donner cette matière première à des couturières qui vont fabriquer des sur-blouses pour les hôpitaux
>>>> 19h01 / Guillaume et Pauline et leurs trois filles,Moïra l'ainée, Romane et Elinor qui a quelques mois. Pauline est médecin à l'hôpital et me raconte avoir repris le boulot en pleine crise du Covid juste à la fin de son congé maternité, un retour au travail particulièrement chargé. Elle raconte que seulement maintenant, les choses semblent un peu, revenir à la normal. "On revoit petit à petit nos patients habituels. Avant tout était centré sur le Covid". Moira et Romane vont au centre de loisirs ouvert pour quelques enfants de soignants ou de personnes "inconfinables", Guillaume me dit qu'il y a une petite douzaine d'enfants.
>>>> 19h07 _ Ewa, les trois soeur Blind (Emma, Suzanne et Joséphine) et Laurette, qui habite rue des Charmes derrière. Je me disais que, paradoxalement, je n'avais jamais vu autant les enfants jouer en liberté dans la rue, mais à distance certes...
>>>> 19h19, passe René, aussi interpellé par mon nom de famille. "Loubaton, vous êtes du Maroc ? j'ai connu des Loubaton, moi, à Meknès..." on discute un bon moment, René habite un peu plus bas, dans une partie plus "urbaine" de la rue, plus proche de La Croix de Chavaux. Il me raconte qu'il est passionné de musique orientale et a créé sa chaine Youtube 'Tarab Tarab". Lui même joue du Oud. Par ailleurs, je découvre en vérifiant l'orthographe de son adresse mail sur internet qu' il est opticien place des Vosges à Paris et que sa boutique a l'air géniale, remplie de belles lunettes et d'instruments de musique orientale. Le Photon des Vosges.
>>>> 19h22 . Louis et Rosa. Rosa, c'est la fille de Victoire. Elle est en 3e, c'est une chouette fille, je la connais peu mais j'ai quelques fois discuté avec elle, nous faisions partie toutes les deux d'un groupe pour lutter contre le harcèlement à l'école. Depuis l'école élémentaire, j'avais entendu dire que Rosa avait une sacrée personnalité. Elle aimerait devenir avocate je crois. Rosa avoue, bien que reconnaissant que nous sommes très privilégiés dans le quartier, avoir des coups de déprime. Son copain Louis aussi. "On arrive pas à se mettre au travail, c'est difficile tout ça..."
>>>> à 19h40, je fais la connaissance de Léa, Benjamin et de leur nouveau chien Brownie. Ils sont nouveau dans le quartier, heureux d'avoir atterri là