# centre & périphérie
-- Dans ces zones du nord et du sud de Tours, on retrouve les enseignes de tous les espaces périphériques, de Kiloutou à Buffalo Grill. En centre-ville, il y a sûrement Zara et H&M. Les villes sont segmentées et ont désormais partout les mêmes caractéristiques. Mais seuls les centres-villes conservent une certaine singularité. Ici, c'est évident, avec cette architecture à colombages, que nous ne sommes pas dans une ville du Nord ou de la Méditerranée. Et c'est encore dans les centres-villes que subsistent boutiques et restaurants. Ce patron qui présente son menu sur une ardoise a certainement son bagout, sa gastronomie. À l’inverse, Mc Do et Pizza Hut des zones périphériques vont servir une nourriture standardisée.
-- Impossible de donner rendez-vous dans ces lieux : malgré la surabondance de signes, d'enseignes, on s'y perd. Ce qui frappe également dans ces espaces, c'est l'absence de repères traditionnels pour le piéton. Et les centres-villes sont d'autant plus piétonnisés que tous les espaces périurbains sont structurés, submergés, organisés par la voiture. Même les enseignes y sont à l'image de la signalisation routière : efficaces, aux couleurs tranchées et vives. Les bâtiments sont eux aussi séparés, distincts. Dans le centre-ville au contraire, les couleurs sont pastel, les façades s'enchaînent et se fondent. Alors que le vide domine en périphérie, en centre-ville règne une atmosphère de côtoiement.
-- Dans ces villes où le peuple ne vit plus, il vient grappiller un peu de la vie urbaine, en touriste ou chaland. Le petit train évoque très explicitement cette ville muséifiée, cette ville du loisir.
-- Tous ces lieux nous parlent de la place de chacun. Les zones périphériques sont l'ordinaire des gens modestes et les centres-villes leurs lieux de passage. L'espace exprime et renforce la place attribuée à chacun dans la hiérarchie sociale.
Monique et Michel Pinçon-Charlot, sociologues. in REGARDS, septembre 2005.